QAG – Délocalisations au sein du Groupe Engie
Question orale | N° 334 |
M. Ugo Bernalicis | La France insoumise – Nord |
Ministère interrogé | Secrétaire d’État auprès du ministre de l’économie et des finances |
Question posée le | 23/11/2017 |
Lien hypertexte | https://www.youtube.com/watch?v=XhwW8Ocw_wU&t=127s |
Texte de la question
Monsieur le ministre de l’économie et des finances, je vais critiquer une entreprise qui réussit. (« Ah ! » sur plusieurs bancs du groupe LR.) Plus de 1,7 milliard d’euros de dividendes versés aux actionnaires, cela semble être un bon critère jupitérien de la réussite. Cette entreprise, c’est Engie, autrefois appelée GDF Suez.
Aujourd’hui, les salariés réunis en intersyndicale sont au tribunal de Nanterre, dans le cadre d’une procédure pour défaut d’information et de consultation du comité d’entreprise au sujet de la délocalisation de 1 200 emplois sur l’activité de relation clientèle en France. Il y a dix ans, lors de l’ouverture du marché à la concurrence, Engie fermait ses accueils au public. Depuis, l’entreprise s’est séparée de près de la moitié des salariés de son service clientèle, alors que 30 % de l’activité de celui-ci était délocalisée hors de France. Désormais, c’est depuis l’étranger que l’on vous informe de cette mission de service public. Un comble !
Avec le cynisme que l’on vous connaît, vous me direz sûrement que tout cela est tragique, mais que c’est la vie des entreprises. Or, alors qu’Engie supprime des emplois et délocalise ses activités, pour un gain espéré d’environ 3,6 millions d’euros, ce sont 70 millions d’euros que l’entreprise a empochés en 2014 et 100 millions d’euros en 2015 et les années suivantes au titre du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi – CICE –, sans engagement ni contrepartie visant à favoriser l’emploi en France.
Pourtant, l’actionnaire majoritaire n’est autre que l’État. Mais l’État ne fait rien – pire, il encourage ces pratiques !
En baissant sa recette fiscale au profit de l’entreprise et en versant des dividendes en tant qu’actionnaire, l’État délocalise et pratique l’optimisation fiscale, notamment au Luxembourg, au détriment de l’emploi.
Ce problème peut être résolu, d’autant que le Président de la République connaît bien les dirigeants d’Engie. Gérard Mestrallet, l’actuel président d’Engie, s’est empressé d’indiquer que Jupiter représentait un véritable espoir pour des entreprises comme la sienne, tandis qu’Isabelle Kocher, l’actuelle directrice générale du groupe, a accompagné le Président Macron dans son avion présidentiel avant son allocution devant l’Assemblée générale de l’ONU. Elle était d’ailleurs à la manœuvre pour effacer une dette de 1 milliard d’euros en 2012, comme nous l’apprennent les Paradise papers. Ce beau monde serait-il plus intéressé par l’argent que par le progrès social ?
Monsieur le ministre, ma question est la suivante : comment allez-vous vous imposer, en tant qu’État stratège, pour préserver et relocaliser l’emploi en France ?
Texte de la réponse du secrétaire d’État auprès du ministre de l’économie et des finances, Benjamin Griveaux
Monsieur le député, la surprise aurait été que vous vous félicitiez quand une entreprise réussit et va bien. Malheureusement, vous n’êtes jamais à ce rendez-vous.
Les organisations syndicales d’Engie dénoncent, vous le savez, un mouvement de sous-traitance du service client et de la télévente à l’étranger, qui menacerait des emplois au sein du groupe Engie en France. Nous avons été contactés à ce sujet par les organisations syndicales, et nous suivons ce dossier avec la plus grande attention, loin des caricatures.
Dans ce contexte, la société nous a informés que certains de ses prestataires de services de télévente lui ont signalé leur intention de faire évoluer leur offre de sous-traitance. C’est à Engie de fixer le cahier des charges ! Elle nous a également indiqué qu’il n’était pas prévu de modifier le périmètre des emplois téléphoniques au sein de l’unité chargée de la relation client d’Engie en France. Ces emplois seront donc maintenus.
Nous serons, à l’évidence, extrêmement attentifs, en lien avec les représentants du personnel, à l’évolution de cette situation… dans un contexte très particulier pour le groupe Engie, vous le savez. Le groupe évolue – vous avez eu l’honnêteté de le rappeler – dans un marché de l’énergie qui connaît des mutations et des transformations importantes, liées à l’impératif de la transition écologique qui vous est chère… à l’intensification de la concurrence, avec de nouveaux entrants, et à l’évolution de la chaîne de valeur.
Pour répondre à ces défis, Engie met en œuvre un plan de transformation ambitieux depuis le début de l’année 2016. L’État, présent au conseil d’administration d’Engie, suit avec attention la réalisation de ce plan de transformation et se tiendra toujours à l’écoute des représentants du personnel… et des élus de ces territoires, qui sont les bienvenus à mon cabinet.